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NOTES ^27

lève et continue la ligne idéale. Il s'établit ainsi au oœur de l'œuvre une série d'échanges mystérieux, de demandes et de réponses dont le peintre possède seul la clef^ et dont il nous offre, pour que notre délectation soit intarissable, non les données, mais les résultats. Ces préoccupations se retrouvent chez tous les Renaissants, mais chez les uns le geste, au cours de l'exécution, oublie sa nécessité primordiale pour devenir anecdotique ou sentimental, chez les autres il n'est plus qu'une froide indication ressortissant à une rhétorique académique. La grandeur de Raphaël provient de ce que le geste est chez lui, autant que le véhicule d'un sentiment humain, l'expression d*une nécessité constructive. — Alors que tant de peintres sont, ou de froids constructeurs (les classiques de la décadence), ou de simples ouvriers du sentiment (les romantiques), Raphaël, participant des deux écoles, s'exprime simultanément en homme et en Dieu : il crée en imitant, il imite en créant. L'ineffable beauté de ses compo- sitions provient de la fusion des deux langages, de la coïnci- dence et de la parfaite superposition de deux modes d'expression dont aucun Maître jusqu'ici — sauf parfois David, Ingres et Cézanne — n'a accompli aussi heureuse- ment le mystique mariage.

��Nous étudierons prochainement, à propos de Cézanne, la lutte entre les deux forces que Raphaël concilie si aimable- ment, et qui, chez le Maître d'Aix, s'affrontent en une espèce de combat brûlant et tumultueux. C'est que Cézanne avait à reconquérir des vérités beaucoup plus difficilement acces- sibles que celles que Raphaël introduisait peu à peu et comme sans effort dans la technique disciplinée qu'il hérita de ses maîtres. Cézanne, après avoir Htilisé uniquement les richesses dangereuses de l'arsenal romantique — dont Raphaël ne fit (^e des ornements supplémentaires — dût y renoncer

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