Page:NRF 14.djvu/925

Cette page n’a pas encore été corrigée

NOTES 919'

manières de penser. En désespoir de cause, et contre toute loyauté, les meilleurs logiciens essaient d'obtenir notre assentiment au moyen d'une image. C'est, a dit Lautréa- mont, que « la métaphore rend beaucoup plus de services aux aspirations humaines vers l'infini que ne s'efforcent de se le figurer ceux qui sont imbus de préjugés. )> J'entends bien que l'abus de confiance n'est pas grave et qu'il y a intérêt à encourager tout ce qui peut jeter un doute sur la raison. L'idée de la contradiction, qui demeure à l'ordre du jour, m'apparaît comme un non-sens. De l'unité de corps on s'est beaucoup trop pressé de conclure à l'unité d'ame, alors que nous abritons peut-être plusieurs consciences et que le vote de celles-ci est fort capable de mettre chez nous deux idées opposées en ballottage. Cette théorie, en tout cas, s'accorde parfaitement avec le peu qu'il nous est donné de savoir de l'hérédité.

Le propre du désir étant de nous préparer une décep- tion, j'aime qu'à ce point il se montre inéluctable. Les mystères que prétend me révéler Lautréamont, page 243, je ne les discute même pas. Deux corps combinés, en chi- mie, peuvent dégager une chaleur telle, donner lieu à un précipité si franc que l'expérience ne m'intéresse plus. De telles préparations sont encore celles qui procurent le véri- table repos des sens. Il est étrange qu'on reproche aux poètes de faire appel à la surprise, comme si nous ne sou- haitions pas toujours qu'on tire un coup de revolver à notre oreille afin de nous éviter quelques secondes de faire attention.

C'est aussi pourquoi nous aimons tant rire. Tout le temps que dure l'explosion, sa cause nous échappe (il y a loin de là à ce mysticisme de la mystification dont on a parlé). Le plaisant « souci de dignité » commun à tous les hommes dont nous entretenait récemment Charlie Chaplin a beau nous obliger à nous reprendre, de tels accès n'en méritent

�� �