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7l8 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Avant de tenter l'aventure que je méditais, je pris soin de m'observer soigneusement en m'habituant à contrôler toutes mes créations intellectuelles, par rapport aux règles courantes de l'imagination dans notre société.

A la chasse, ma main ne tremblait jamais ; mon coup de fusil partait naturellement comme le prolongement naturel de ma pensée. Jamais l'image de Katje ne vint s'interposer entre le guidon de mon hammerless et le but à viser.

Quand je traitais ma servante en amie, je ne lui demandais pas de me réciter le paranymphe des démons. Je soupçonnais, toutefois, leur présence dans nos rapports commerciaux avec les paysans.

Quelquefois, cependant, j'éprouvais une grande satisfaction à posséder entre mes bras une fille qui pouvait être une succube merveilleuse et donner à nos embrassements la saveur soufrée du sacrilège.

En somme, j'aimais cette fille à la manière d'un ama- teur d'estampes « découvertes » et de raretés bibliogra- phiques. Je n'ai jamais cru très profondément à l'irréalité de Katje. Et il me répugnait de la confondre avec une incarnation de Satan, même sous une forme aimable et voluptueuse.

Je ne pus jamais, malgré mes efforts, surprendre le départ de Katje pour le sabbat des sorcières. J'assistais en connaisseur aux préparatifs du départ. La belle fille s'oignait elle-même d'une graisse qu'elle achetait en pot chez un rebouteux, respecté dans le pays. Elle n'en connaissait pas la composition et ne manifestait aucune curiosité à cet égard. Elle oignait de même son balai — un balai neuf réservé à ma chevaucheuse d'escovettes.

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