Page:NRF 14.djvu/697

Cette page n’a pas encore été corrigée
SUR L’INTRODUCTION A LA MÉTHODE DE LÉONARD DE VINCI
691

une phrase que l’on ne saurait se dispenser de citer, car elle renferme une définition de l’acte d’écrire qui nous place juste au point d’où nous pouvons saisir l’opération exactement comme elle apparaît à l’esprit de M. Paul Valéry : « Écrire devant être le plus solidement et le plus exactement qu’on le puisse, de construire cette machine de langage où la détente de l’esprit excité se dépense a vaincre des résistances réelles, il exige de l’écrivain qu’il se divise contre lui-même. » La construction de cette machine de langage, voilà bien pour Valéry l’opération centrale, et en un certain sens l’unique. S’il existe aujourd’hui quelqu’un pour qui la vieille expression grammaticale : les parties du discours, ait gardé toute la vigueur de son sens primitif, c’est bien lui, — lui pour qui les parties du discours sont ce que sont au géomètre ses figures. Les plus subtils problèmes de la mécanique verbale ne cessent de se poser devant lui : chaque mot est examiné, estimé d’un double point de vue, comme élément statique et comme élément dynamique : d’une part Valéry jauge sa pesanteur, suppute sa capacité de résistance et l’utilise où il faut, mais d’autre part il apprécie son pouvoir émissif et à l’heure favorable il en libère le rayonnement. Ainsi seulement pense-t-il assurer « quelque durée à l’assemblage voulu ».

L’assemblage voulu par Valéry prosateur se distingue cependant de l’assemblage voulu par Valéry poète : Sans doute dans les deux cas la faculté qui ordonne, — qui préside à l’assemblage, — reste la même ; c’est cette précision à laquelle Valéry aspirait dès 1894 et dont, faisant retour sur son passé, il nous dit dans Note et Digressions : « Pour comble de malheur, j’adorais confusément.