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��REFLEXIONS SUR LA LITTERATURE

��LE ROMAN DE LA DESTINEE

Deux romans musulmans, écrits par des musulmans, viennent d'être chez nous l'objet de la plus grande faveur : Saâda la Maro- caine, de Madame Elissa Rhaïs, et le Livre de Goba le Simple, de MM. Albert Adès et Albert Josipovici. Il y a toutes sortes de raisons de se réjouir de ce succès. D'abord les deux livres le méritent : ils sont vraiment intéressants. Ensuite, ils nous attestent une vie réelle, curieuse, féconde, dans ces belles civilisations de l'Islam qui ont chez nous tant d'amis passionnés, qui ont exercé sur tant de nos écrivains de belles séductions, et qui trouvent aujourd'hui dans la langue et la culture française un milieu où elles circulent avec distinction et aisance ; ils nous permettent de rêver à une littérature musulmane de demain, à une belle figure méditerranéenne. Enfin, ils nous apportent des idées et des sentiments de l'Islam au moment même où nous sommes au point précis qui nous permet de les comprendre et de les goûter. Ou plutôt la grande idée et le grand sentiment de l'Islam : la destinée humaine. Dans le Livre de Goba le Simple, elle apparaît un peu confusément, selon notfe goût occi- dental, parce que l'art de MM. Adès et Josipovici est un peu un art d'arabesques, un art de détails indéfinis et charmants : je ne suis peut-être ici pas très impartial, parce que je vois Goba à travers de vieux souvenirs, et que le livre a été pour moi exacte- ment l'une de ces étincelantes après-midi d'il y a dix ans, passées tout entières au hasard, ainsi qu'en une forêt l'été, dans les rues du Caire, et où j'ai rencontré bien certainement Goha et Sayed, El- Zaki et Alyçum. Evidemment Octave Mirbeau exagère quand il dit, que le style de ce roman est «aussi pur que le style de Flaubert»

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