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LE PARADIS DES CONDITIONS HUMAINES • 563

délivrée de la réserve où la retiennent, pendant la vie, les ombrageuses velléités de ses compagnons ?

Le seuil retentissait toujours du mouvement des en- trants et des sortants. Nous traversions des salles où se promenaient des couples. Des saluts affectueux s'échan- geaient. Tout nouvel arrivant était reçu avec la même haute courtoisie, mais une nuance insensible faisait bientôt leur juste part aux pèlerins d'une nature loyale et bienveillante.

Pour que les chambres fussent fraîches, les jardins étaient ensoleillés. Le parfum des fleurs et celui des herbes rendaient plus vibrante encore une atmosphère par- courue d'affinités. Des concerts naissaient à tout moment ; les uns, simples et entraînants, accusaient le rythme de la conversation ; ils s'interrompaient sur une remarque, et repartaient sur un mouvement de gaîté ; les autres, d'une nature plus intime, creusaient des silences où les esprits trouvaient le loisir de s'entendre mieux; en apparence l'orgue, les violons et le reste des instruments y élevaient seuls la voix, mais ils ne servaient qu'à ouvrir les écluses intérieures.

Peu à peu se sont nouées des habitudes et créés des attachements. Le costume noir et blanc de nos compagnes a commencé à hanter nos souvenirs. Et bientôt plusieurs d'entre nous ont su que, dans un coin plus paj-ticulière- ment cher et familier du couvent, il y avait un sourire prêt à récompenser leur retour.

C'est ainsi que je me trouvais une fois dans une allée de lavande auprès de celle que je préférais à toute autre. Plusieurs de nos amis nous entouraient; Renaut n'était pas loin de moi, et je pouvais entendre à quelque dis-

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