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50 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

grandes lignes de ce qui est devant nous grâce à des lueurs faiblement réfléchies par de mornes miroirs placés derrière nous, et nous nous avançons en trébuchant, de notre mieux, jusqu'au moment où la trappe cède sous nos pieds et nous avale. Quelquefois ils disent que l'avenir et le passé sont comme un panorama qui se dévide entre deux rouleaux. Ce qui est sur le rouleau de l'avenir se déroule pour s'enrouler sur celui du passé. Nous ne pouvons ni accélérer le mouvement, ni l'arrêter. Nous sommes obligés de voir tout ce qu'on nous en déroule, bon ou mauvais ; et ce que nous avons une fois vu, nous ne devons plus jamais le revoir. Le panorama se déroule et s'enroule sans un moment de répit ; nous saisissons une seconde de son passage et l'appelons " le présent ". Nos sens troublés reçoivent l'impression qu'ils peuvent, et nous essayons de deviner ce qui va venir d'après l'aspect de ce qui vient de passer. C'est la même main qui a peint toute la toile, et les détails varient peu : fleuves, bois, plaines, montagnes, villes et peuples ; l'amour, le chagrin, et la mort ; — et pourtant l'intérêt ne faiblit jamais et, pleins d'espoir, nous nous attendons à quelque grand bonheur, ou, pleins de crainte, nous regardons si nos propres personnes ne vont pas faire partie de quelque spectacle horrible. Quand la scène est passée, nous nous imaginons que nous la connaissons, mais il y avait tant de choses à y voir et nous avons eu si

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