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SI LE GRAIN NE MEURT 417

maman. Elle ne vint, je crois bien, qu'une seule fois à Uzès pendant que nous y étions ; nous la surprîmes aussitôt qui faisait la rafle des bas.

— Huit ! j'en ai trouvé huit, disait-elle à ma mère, à la fois amusée et exaspérée par tant d'incurie. Et le soir elle ne se retenait pas de demander à grand'mère pour- quoi jamais elle n'en achevait un, une bonne fois?

La pauvre vieille d'abord tâchait tout de même de sou- rire, puis tournait son inquiétude vers ma mère.

— Juliette ! qu'est-ce qu'elle veut, Anna?

Mais ma mère n'entrait pas dans ce jeu, et c'est ma tante qui reprenait plus fort :

— je demande, ma mère, pourquoi jamais vous n'en achevez un au lieu d'en commencer plusieurs?

Alors, la vieille un peu piquée, serrait les lèvres, et ripostait soudain :

— Achever! achever... Eh! elle est bonne Anna! Il faut le temps !

La continuelle crainte de ma grand'mère était que nous n'eussions pas assez à manger. Elle qui ne mangeait presque rien elle-même, ma mère avait grand mal à la convaincre que quatre plats par repas nous suffisaient. Le plus souvent, elle ne voulait rien entendre, s'échap- pait d'avec ma mère pour avoir avec Rose des entretiens mystérieux. Et, dès qu'elle avait quitté la cuisine, ma mère s'y précipitait à son tour, et, vite, avant que Rose ne fût partie au marché, révisait le menu et décomman- dait les trois quarts.

— Eh! bien. Rose, ces gelinottes, criait grand'mère au déjeûner.

— Ma mère, nous avions ce matin les côtelettes.

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