392 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
OU bien, immobiles, émerveillants de gravité, nous écoutions l'esprit qui chante le long des mâts télégra- phiques. Elle, appuyant sa main sur le bois brûlant de soleil : «Est-ce parce qu'il chante qu'il a chaud ? Où est- ce parce qu'il a chaud qu'il chante ?»
Au lieu dit La Folie, dans une petite maison rose, écartée, un clavecin faisait un bruit d'abeilles ; la petite maison rose était comme une boîte à musique. Soudain nous la vîmes s'envoler, monter dans les airs. «Ah ! dit la fille, aussi pourquoi
faire de la musique si douce ? » C'est ce qu'elle dit. A mon côté, dans l'air jeunet, elle entrait son corps, mystère de fraîcheur. O fille ! sœur des neiges, sœur de l'eau, sœur de l'ombre,
sœur de l'averse aux soirs d'Août! Les arbres chargés de grâce se penchaient pour la voir passer ; les bour- geons, dans son sillage, se raidissaient, soudain mûris. Auprès de nous, délirant d'elle,
un ballet de papillons palpitait comme la chaleur. Quand l'aimée se posait sur une branche, autour d'elle l'amant tournoyait, et chaque fois qu'il s'approchait davantage, l'aimée frémissait dans ses ailes... Ils s'en- fuirent et, tandis qu'elle volait, rythmiquement il la bouclait de son vol.
Mais je tressaillis en voyant l'un d'eux, collé sur une fleur, se gorgeant de suc. Les ailes de sombre pourpre
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