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172 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

encore ? On va me voir. On va me punir de ne pas dormir, d'avoir vu... Je passe ma tête à travers les fers de la rampe... Précisément des invités arrivent, un militaire en uniforme, une dame toute en rubans, toute en soie ; elle tient un éventail à la main ; le domestique, mon ami Victor, que je ne reconnais pas d'abord à cause de ses culottes et de ses bas blancs, se tient devant la porte ouverte du premier salon et introduit... Tout à coup quelqu'un bondit vers moi ; c'est Marie, ma bonne, qui comme moi tâchait de voir, dissimulée un peu plus bas au premier angle de l'escalier. Elle me saisit dans ses bras ; je crois d'abord qu'elle va me reconduire dans ma chambre, m'y enfermer ; mais non, elle veut bien me descendre, au contraire, jusqu'à l'endroit où elle était, d'où le regard cueille un petit brin de la fête. A présent j'entends parfaitement bien la musique. Au son des instruments que je ne puis voir, des Messieurs tourbillon- nent avec des dames parées qui toutes sont beaucoup plus belles que celles du milieu du jour. La musique cesse ; les danseurs s'arrêtent ; et le bruit des voix remplace celui des instruments. Ma bonne va mé remmener, mais à ce moment une des belles dames, qui se tenait debout, appuyée près de la porte, et s'éventait, m'aperçoit ; elle vient à moi, m'embrasse et rit parce que je ne la recon- nais pas. C'est évidemment cette amie de ma mère que j'ai vue encore ce matin même ;• mais. tout de même je ne suis pas bien sûr que ce soit tout à fait elle, elle réelle- ment... Et quand je me retrouve dans mon lit, j'ai les idées toutes brouillées et je pense, avant de sombrer dans le sommeil, confusément : il y a la réalité et il y a les rêves ; et puis il y a une seconde réalité.

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