Page:NRF 14.djvu/133

Cette page n’a pas encore été corrigée

NOTES 127

c'est dans l'œuvre d'un Descartes où s'affirme le rationalisme, dans l'œuvre d'un Malebranche et d'un Maine de Biran où les exigences de la vie intérieure se concilient avec les exigences de l'intelligence, qu'il faut placer notre tradition philosophique. Telle est la Philosophie Française, D'excellentes pages sur Descartes, Malebranche, Pascal, Rousseau, Comte, des études entièrement neuves et originales sur Condillac, BuiFon, les Idéologues, Lamarck, Maine de Biran et Bonald, où se révèlent une rare pénétration psychologique, un don de sym- pathie et le respect des idées, restituent enfin sa variété et son ampleur à la pensée française mutilée, faussée et trahie au cours du xix^ siècle par l'interprétation conventionnelle de l'Ecole, moins soucieuse de sauvegarder les droits de l'intelligence que les intérêts du spiritualisme de sentiment et du libéralisme politique. Et il n'était pas sans intérêt, dans la période de confusion où nous sommes, de rappeler, avec la vigueur de Delbos, que l'attitude rationaliste, le besoin de comprendre, l'attachement à la science ont été acquis définitivement aux temps modernes par la révolution cartésienne. Mais le déve- loppement des éléments originaux de la pensée française suffit-il à nous mettre en possession d'une tradition philosophique ? Si Delbos identifie la tradition philosophique au courant de pensée classique et chrétien qui est le propre du xvii® siècle et qui trouve en Malebranche son interprète, s'il est amené à considérer les autres courants de pensée comme dissidents et secondaires, il semble bien que ce soit surtout en vertu de son attachement à certaines traditions morales. Ici les convictions intimes font éclater les cadres de l'histoire et la Philosophie Française devient le testament philosophique de Delbos. Or, si légitime soit le désir de placer dans la vie intérieure le terme de la méditation, la vie intérieure elle-même est trop étroite- ment liée à la vie sociale pour que l'historien puisse s'effacer aussi complètement devant le philosophe. La pensée, non plus que l'action, n'est soustraite aux fluctuations quotidiennes, aux

�� �