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NOTES 969

tant de mois d'ex I, ces trois colonnes au seuil de sa vie, chaque aurore. Je comprends celui qui, à chaque station nouvelle de ces longs voyages, choisit quelques arbres pour amis et les préfère aux chiens.

Peu d'écrivains auront travaillé sous autant de latitudes diverses. La distance est grande de Chine à Rio-de- Janeiro, à travers la Bohême, l'Allemagne, l'Italie, et ces premières étapes, Paris, New-York. Cette diversité de Heux se reflète tout au long de son œuvre et Claudel utilise volon- tiers les éléments qu'il trouve ainsi à portée de sa main. Drames et poèmes ont pour décors les villes ou les contrées que le poète habite et leur empruntent leurs figures et leurs images. Pourtant Claudel, à aucun titre, n'a sa place dans ce genre Uttéraire que plusieurs auteurs s'efforcent, non sans succès, de moderniser : l'exotisme. Peu importe une défi- nition, nécessairement imparfaite, de ce mot. Il suffit de remarquer que chez Claudel la description même des pays les plus lointains et tant de traits rapportés d'Extrême- Orient ou des Tropiques, n'ont jamais leur but en eux-mêmes, mais expriment la pensée lyrique ou servent le mobile du drame. Le Repos du Septième jour n'est pas davantage un drame chinois que Bajazet n'est une tragédie turque. Il ne faut pas s'y tromper. Je dirai la même chose de Connais- sance de l'Est, que certains prennent pour un livre de paysages chinois et qui cache pour moi, sous ses apparences descrip- tives, le déroulement d'un drame secret, dont la Chine n'est qu'un des personnages.

Dans L'Ours et la Lune, 3iussi bien que dans La Messe là-bas, l'Amérique brésilienne est présente. Le poète emprunte au paysage qui l'entoure ses suggestions les plus directes. Il évoque ce qu'il voit, lorsque, chaque matin, pour entendre cette « messe là-bas », il traverse les jardins encore frais et les arceaux de palme. Ainsi, l'Ours-banquier, héros du drame pour marionnettes, passe une moitié de sa vie double dans la

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