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LE CHAGRIN DE LA SÉPARi^TION ET l'oUBLI 85

les choses les plus simples. « Voilà trois mercredis que vous me faites faux bond », disait Mme Swann à Mme Cottard. « C'est vrai, Odette, il y a des siècles, des éternités que je ne vous ai vue. Vous voyez que je plaide coupable, mais il faut vous dire, ajoutait-elle d'un air pudibond et vague, car quoique femme de médecin elle n'aurait pas osé parler sans périphrases de rhumatisme ou de coliques néphrétiques, que j'ai eu bien des petites misères. Chacun a les siennes. Et puis j'ai eu une crise dans ma domesticité mâle. Sans être plus qu'une autre très imbue de mon autorité, j'ai dû, pour faire un exemple, renvoyer mon Vatel qui , j e crois, cherchait d'ailleurs une place plus lucrative. Mais son départ a failli entraîner la démission de tout le ministère. Ma femme de chambre ne voulait pas rester non plus, il y a eu des scènes homériques. Malgré tout, j'ai tenu ferme le gou- vernail, et c'est une véritable leçon de choses qui n'aura pas été perdue pour moi. Je vous ennuie avec ces histoires de serviteurs, mais vous savez comme moi quel tracas c'est d'être obHgée de procéder à des remaniements dans son personnel. »

— Mais vous me semblez bien belle ? Redfern fecit ?

— Non, vous savez que je suis une fervente de Rauthnitz. Du reste, c'est un retapage.

— Eh bien ! cela a un chic !

— Combien croj^ez-vous ?... Non, changez le premier chiffre.

— Comment, mais c'est pour rien, c'est donné. On m'avait dit trois fois autant. » « Voilà comme on écrit l'Histoire, concluait la femme du docteur. Et montrant

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