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920 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

volontaire, rien n'écarte plus du bonheur qu'une sou- mission sans amour.

Au demeurant, Jacques raisonne bien, et si je ne souf- frais de rencontrer, dans un si jeune esprit, déjà tant de raideur doctrinale, j'admirerais sans doute la qualité de ses arguments et la constance de sa logique. Il me paraît souvent que je suis plus jeime que lui ; plus jeune aujourd'hui que je n'étais hier, et je me redis cette parole : « Si vous ne devenez semblables à des petits enfants, vous ne sauriez entrer dans le Royaume. »

Est-ce trahir le Christ, est-ce diminuer, profaner l'Evan- gile que d'y voir surtout une méthode pour arriver à la vie bienheureuse ? L'état de joie, qu'empêchent notre doute et la dureté de nos cœurs, pour le chrétien est vm état obligatoire. Chaque être est plus ou moins capable de joie. Chaque être doit tendre à la joie. Le seul sourire de Gertrude m'en apprend plus là-dessus, que mes leçons ne lui enseignent.

Et cette parole du Christ s'est dressée lumineusement devant moi. « Si vous étiez aveugles, vous n'auriez point de péché. » Le péché, c'est ce qui obscurcit l'âme, c'est ce qui s'oppose à sa joie. Le parfait bonheur de Gertrude, qui rayonne de tout son être, vient de ce qu'elle ne con- naît point le péché. Il n'y a en elle que de la clarté, de l'amour.

J'ai mis entre ses mains vigilantes les quatre évangiles, les psaumes, l'apocalypse et les trois épîtres de Jean où elle peut lire : « Dieu est lumière et il n'y a point en lui de ténèbres » comme déjà dans son évangile elle pouvait entendre le Sauveur dire : « Je suis la lumière du monde ; celui qui est avec moi ne marchera pas dans les ténèbres ».

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