Page:NRF 13.djvu/922

Cette page n’a pas encore été corrigée

914 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

l'accorder à l'esprit et au nombre de la langue. Les auteurs du livre cité plus haut n'écriraient peut-être pas exacte- ment les mêmes choses, aujourd'hui. Il apparaît que la poésie qui se confondait à l'origine avec la musique, tend à se différencier de plus en plus. Mais un art est toujours influencé par les modes qui régnent dans un art voisin. Il est aisé de voir que l'impressionnisme s'est propagé à travers diverses formes d'art, mais presque impossible d'en discerner le point de départ.

Beaucoup de tentatives récentes donnent l'impression d'un effort d'illusion et de remplacement. Le besoin de nouveauté est naturel et fécond, mais ne pouvant se satisfaire aisément dans le domaine de la pensée et du sentiment, il se tourne vers l'expression ; aussi est-il encHn à se satisfaire de ces artifices de typographie qui trompent une curiosité superficielle.

C'est pourquoi l'on est amené à se demander s'il est juste de voir, dans l'instinctive fidélité que garde la mémoire aux formes anciennes des vers français, ime simple routine de l'esprit. Ne serait-ce pas un hommage involon- taire rendu à leur excellence? Dans cette hypothèse, beaucoup de tentatives s'exerceraient en dehors ou con- trairement à l'esprit d'ime langue dont toute l'histoire n'est qu'une longue sélection des formes les plus favorables à sa nature. On les croit desséchées, mais c'est peut-être seulement qu'elles sont vides. Ce serait alors non plus de nouveautés techniques, mais d'une rénovation du senti- ment et, partant, des modes d'interprétation collective des thèmes éternels qu'on devrait attendre un soulè- vement lyrique comparable à celui du romantisme ?

Quoi qu'il en soit, la mémoire poétique est un phéno-

�� �