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l'enfant qui s'accuse 879

jardinier. C'était un couteau si facilement reconnaissable que Julien n'aurait guère pu en faire usage sans être immé- diatement dénoncé. Or, trois semaines plus tard, la serpette se retrouve sur l'établi, bien en vue. Il faut qu'il l'ait rapportée là. Pour l'argent, chaque fois que Julien en a eu entre les mains, il en a rendu compte exactement. C'est seulement ces temps derniers que nous avons remarqué de petites choses. Il s'est vanté à ses camarades d'avoir carotté vingt sous sur une saillie. Puis, la semaine dernière, je lui ai donné la clef de la cave pour aller cher- cher du cidre. Deux jours après, je dis à ma femme : « Est-ce toi qui es retournée à la cave ? » Elle dit que non et qu'elle n'a donné les clefs à personne. Alors j'ai été voir de plus près et je me suis aperçu qu'on avait tiré le verrou intérieur qui fermait la porte de derrière. Ce ne pouvait être que Julien. Il a commencé par nier. Ça, il est menteur ; c'est ce qu'on peut surtout lui reprocher. Mais à la fin, il a bien été obligé de reconnaître qu'il avait ouvert la porte, et que, n'ayant pas de verre sous la main, il avait bu dans l'entonnoir. Il aurait encore bien été capable de s'entendre avec son père pour emporter du cidre. Tout cela est ennuyeux parce que j'étais plutôt content de lui. Il faisait bien son travail. Il n'aime pas soigner les cochons, mais je lui avais promis les chevaux s'il se conduisait bien. Souvent, quand je rentrais du marché, il venait de lui-même au devant de la jument et offrait un coup de main, ce qu'aucun des autres n'aurait jamais fait.

Le jeune Julien Vincent, dit Rongeard, va avoir quinze ans. Son père, qui est venu chez moi élaguer les haies et planter des arbres, travaille à la journée ; c'est un homme

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