ancien 1er janvier parce que cette fois il y avait en moi au lieu de l’acceptation pure et simple de cette souffrance, l’espoir, à chaque instant, de la voir cesser. À cette acceptation, je finis pourtant par arriver ; alors je compris qu’elle devait être définitive et je renonçai pour toujours à Gilberte, dans l’intérêt même de mon amour, et parce que je souhaitais avant tout qu’elle ne conservât pas de moi un souvenir dédaigneux. Même, à partir de ce moment-là, et pour qu’elle ne pût croire à une sorte de dépit amoureux de ma part, j’acceptai souvent ses rendez-vous, et, au dernier moment, je lui écrivais que je ne pouvais pas venir, mais en protestant que j’en étais désolé, comme j’aurais fait avec quelqu’un que je n’aurais pas désiré revoir. Ces expressions de regret qu’on réserve d’ordinaire aux indifférents, persuaderaient mieux Gilberte de mon indifférence, me semblait-il, que ne ferait le ton d’indifférence qu’on affecte seulement envers celle qu’on aime. Quand mieux qu’avec des paroles, par des actions indéfiniment répétées, je lui aurais prouvé que je n’avais pas de goût à la voir, peut-être en retrouverait-elle pour moi. Hélas ! ce serait en vain : chercher en ne la voyant plus à ranimer en elle ce goût de me voir, c’était la perdre pour toujours ; d’abord parce que, quand il commencerait à renaître, si je voulais qu’il durât, il ne faudrait pas y céder tout de suite ; d’ailleurs, les heures les plus cruelles seraient passées ; c’était en ce moment qu’elle m’était indispensable et j’aurais voulu pouvoir l’avertir que bientôt elle ne calmerait, en me revoyant, qu’une douleur tellement diminuée qu’elle ne serait plus, comme elle l’eût été encore en ce moment même, et pour y mettre fin, un motif de capitulation, de se réconcilier et de se
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