nant la radiographie au moins sommaire de la réalité insoupçonnable que cacherait un discours étudié, prouvaient que dans l’entourage de Gilberte on avait l’impression que je lui étais importun ; aussi, à peine le maître d’hôtel les eut-il prononcées, qu’elles engendrèrent chez moi de la haine à laquelle je préférai donner comme objet au lieu de Gilberte le maître d’hôtel ; il concentra sur lui tous les sentiments de colère que j’avais pu avoir envers mon amie ; débarrassé d’eux grâce à ces paroles, mon amour subsista seul ; mais elles m’avaient montré en même temps que je devais pendant quelque temps ne pas chercher à voir Gilberte. Elle allait certainement m’écrire pour s’excuser. Malgré cela, je ne retournerais pas tout de suite la voir, afin de lui prouver que je pouvais vivre sans elle. D’ailleurs, une fois que j’aurais reçu sa lettre, fréquenter Gilberte serait une chose dont je pourrais plus aisément me priver pendant quelque temps, parce que je serais sûr de la retrouver dès que je le voudrais. Ce qu’il me fallait pour supporter moins tristement l’absence volontaire, c’était sentir mon cœur débarrassé de la terrible incertitude si nous n’étions pas brouillés pour toujours, si elle n’était pas fiancée, partie, enlevée. Les jours qui suivirent ressemblèrent à ceux de cette ancienne semaine du jour de l’an que j’avais dû passer sans Gilberte. Mais cette semaine-là finie, jadis, d’une part mon amie reviendrait aux Champs-Élysées, je la reverrais comme auparavant ; j’en étais sûr ; et, d’autre part, je savais avec non moins de certitude que tant que dureraient les vacances du jour de l’an, ce n’était pas la peine d’aller aux Champs-Élysées. De sorte que durant cette triste semaine déjà lointaine, j’avais supporté ma tristesse avec calme parce qu’elle
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