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LA SYMPHONIE PASTORALE 759

se passer ? J'en étais plus étonné, plus peiné que je n'au- rais voulu me l'avouer à moi-même et déjà je me propo- sais d'intervenir lorsque je vis Jacques tout à coup tirer sa montre.

— Il est temps que je te quitte, à présent, dit-il ; mon père va bientôt revenir.

Je le vis alors porter à ses lèvres la main qu'elle lui abandonna ; puis il partit. Quelques instants après, ayant redescendu sans bruit l'escalier, j'ouvris la porte de l'église de manière qu'elle pût l'entendre et croire que je ne fai- sais que d'entrer.

— Eh bien, Gertrude ! Es-tu prête à rentrer. L'orgue va bien ?

— Oui, très bien, me dit-elle de sa voix la plus natu- relle ; aujourd'hui j'ai vraiment fait quelques progrès.

Une grande tristesse emplissait mon cœur, mais nous ne fîmes l'un ni l'autre aucune allusion à ce que je viens de raconter.

Il me tardait de me trouver seul avec Jacques. Ma femme, Gertrude et les enfants se retiraient d'ordinaire assez tôt après le souper, nous laissant tous deux prolonger studieusement la veillée. J'attendais ce moment. Mais devant que de lui parler je me sentis le cœur si gonflé et par des sentiments si troublés que je ne savais ou n'osais aborder le sujet qui me tourmentait. Et ce fut lui qui brus- quement rompit le silence en m' annonçant sa résolution de passer toutes les vacances auprès de nous. Or, peu de jours auparavant, il nous avait fait part d'un projet de voyage dans les Haut es- Alpes, que ma femme et moi avions grandement approuvé; je savais que son ami T..,

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