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LA PENSÉE FRANÇAISE DEVANT LA GUERRE 669

de notre âge quelque lenteur et un attachement exagéré pour les habitudes acquises, nous nous sommes fait aussi un cœur et un esprit plus savants. Nous sommes moins neufs dans l'art d'aimer et de souffrir. Dans notre vieil- lesse est notre privilège,- est notre science. Nous sommes lucides, sachons le demeurer.

Déjà nous n'avons guère profité de l'expérience révo- lutionnaire pour avoir manqué du réalisme nécessaire aux hommes et aux peuples qui veulent vivre. De notre histoire nous avons fait une épopée et nous avons menti à notre passé. Il n'y a pas d'épopée. Il y a des forces ; des forces aveugles et brutales, des forces spirituelles et morales. De leur rencontre, de leur asservissement mutuel et alternatif, jailHt l'histoire du monde. Arc-boutée contre trois siècles de civilisation, la France a pu main- tenir, vacillante, la lueur d'inteUigence qui refera la clarté sur le monde. Mais ses souffrances seraient inexpiables si elles ne nous avaient rien appris.

RAYMOND LENOIR

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