Page:NRF 13.djvu/64

Cette page n’a pas encore été corrigée

56 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

des hommes. Maintenant, Louba peut se montrer dans la rue sans effrayer les enfants : il a une drôle de petite figure plate et rose, et des appareils en métal à la place des dents.

Ceux-là, ils ont été favorisés du miracle. Pourquoi n'y aurait-il qu'eux ? Ce n'est pas le courage qui manque, ni la patience. La chair est bonne et le sang vigoureux. Et s'il faut subir un long supplice, eh bien ! eh bien ! on le subira !

�� ��La salle est une grande salle à colonnettes qu'afflige un badigeon plombé. C'est une chose dont on ne peut blâ- mer personne : si vous aviez à peindre de tels murs, vous seriez vous-mêmes fort embarrassés. Ce n'est pas triste, et ce n'est pas souriant non plus ; c'est variable comme l'attente et comme l'espoir. La fraîche clarté de Mars n'y peut rien : elle n'est là que pour compter les jours. Elle vient témoigner avec une sorte d'indifférence. Les hommes tirent de leur poche un bout de miroir, et, fur- tivement, apprécient l'injuste laideur qui s'est abattue sur leur face.

Pourtant, ils ne sont pas laids. Moi qui les connais, je dis qu'ils ne sont pas laids. Ils le savent aussi, et quand ils murmurent, avec une voix qui n'a presque plus rien pour s'exprimer : « Je suis bien moche », ils ne font pas allusion à ce que nous appelions la laideur, avant la guerre.

Ils sont au delà de toute laideur et de toute beauté. Ils appartiennent à un monde exceptionnel. Pour la

�� �