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RÉFLEXIONS SUR LA LITTÉRATURE 607

capitaine de Saint- A vit dans le couloir de rochers au bout duquel il y a l'Atlantide. Elle fait corps avec cette imagina- tion, c'est-à-dire avec de la substance, de la plante et de la fleur humaines. Enfin et surtout il y a là une économie mer- veilleuse de moyens : le château des Sablonnières et le passage des saltimbanques, cela demeure peu de choses et ne dépasse pas l'horizon d'une carte d'école primaire, et toute l'aventure romanesque franc aise tient là-dedans comme toute l'aventure active anglaise tient dans certaines pages si simples et si infiniment résonnantes de Stevenson. Mais comme il est difficile à l'aventure et au romanesque de se rejoindre sans que celui-ci empâte et rabaisse celle-là ! Le Grand Meaulnes a peut-être cent pages de trop, celles où le romanesque pro- longe l'aventure quand l'aventure a donné tout son effet : le romanesque est jeté sur les marcs de l'aventure pour en faire une seconde cuvée. Et la dernière phrase qui nous montre Meaulnes engagé dans le romanesque pour sa vie entière diminue par un choc en retour l'intérêt de la pre- mière et pure aventure d'enfant, qui devrait demeurer l'unique.

Je n'ai encore rien dit du Maître du Navire de M. Louis Chadourne. On y trouve la même ingéniosité que dans les livres de M. Benoît, mais son orientation paraît très diffé- rente. M. Benoît est un charmant Imaginatif qui invente des histoires pour le plaisir de les inventer, les conte pour le plaisir de les conter. Le géomètre qui demandait d'^ ihalie : Qu'est-ce que cela prouve ? méritait une réponse positive, car A thalie prouve ou tout au moins démontre beaucoup de choses, poétiques, politiques et humaines. En ce sens les romans de M. Benoît ne « prouvent » à peu près rien, tandis que le Maître du Navire est écrit pour prouver, ou démontrer, ou montrer une certaine idée de l'homme et du monde. Le roman, fort intelligent, de M. Chadourne appartient à

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