comme une femme fait entendre une raison spécieuse, alors les mers siluriennes cessèrent de valser, s’étendirent, et commencèrent leur sombre grossesse.
Un énorme soleil minium tremblotait dans un ciel de plomb. La pluie, la pluie. Des museaux de roc affleuraient. Les premiers songes de la Terre bruissaient. Des lampes muqueuses s’allumèrent et commencèrent leurs voyages. Des vagins de poix, de houille et de jade s’entr’ouvrirent. Des pterichtys pointèrent dans les bas-fonds de gélatine. Les terrains, les forêts sortaient. Un crapaud géant sonna du cor dans le crépuscule des marécages. De longues fumées de fougères montèrent à perte de vue, comme un geyser d’étoiles vertes. Les sigillaires haussaient leurs strobiles de poils. Et des arbres prodigieux cloisonnaient le ciel dans leurs serres, comme une verrière enivrée de lumière et de silence.
…Bientôt les mers se peuplèrent d’une fabuleuse vermine, car les eaux parfaisaient les fruits de la chaleur. De grands sauriens où s’imbriquaient des émaux crasseux, sautant comme des marsupiaux battus par l’orage, avec deux mille dents et des pieds d’oiseaux, se battirent dans les grottes sonores en ouvrant d’immenses bouches déplaisantes. Les pterodactyles, oiseaux du lac Stymphale et vampires du Kansas, plantés sur les rocs comme des haches molles ou fendant le ciel d’un geste croche, frappaient l’air des coups secs de leurs becs de fer. Le gouliphon carnassier courait pataudement dans les forêts solitaires. L’iguanodon l’attendait sans rire, dans quelque carrefour, dressé sur la lumière pâle, espérant le découdre avec son terrible pouce de corne. Des bêtes étranges, couvertes d’une racaille populeuse, écorçaient les arbres