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542 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

SICHEL. — Mais il ne t'aimera pas.

PENSÉE. — Et moi, est-ce que je demandais de l'aimer ?

SICHEL. — C'est moi seule, qui t'aime.

PENSÉE. — Oui, mère.

SICHEL. — Cet homme que tu ne connais pas et qui ne te connaît pas davantage ! Et quand même j'aurais voulu que tu l'épouses, maintenant je ne le veux plus 1 Ah, tu l'aimes, je le vois, et c'est cela qui m'épouvante! De tels sentiments la fin ne peut être heureuse.

PENSÉE. — Mère, est-ce que j'ai été une fille mau- vaise jusqu'ici? Une personne déraisonnable et qui ne sait ce qu'elle veut ?

SICHEL. — Non, Pensée, tu es ma sage enfant, la joie et le remord? de ta mère.

PENSÉE. — Pourquoi le remords ? Appelez-vous cette nuit où je suis un malheur ?

SICHEL. — Plût au ciel que je puisse la prendre pour moi.

PENSÉE. — L'appelez- vous un malhem: ? Non, je le sais et je viens de l'apprendre, elle est le bonheur de ma vie, plus grand que je ne l'avais mérité.

Si je voyais, je serais moins à lui. Si j'étais moins obs- cure, il y aurait moins de bonheur à m'avoir trouvée.

SICHEL. — Cet homme qui nous est hostile, je le sens, je le sais ! Peu de joie nous attend de sa part.

ISruit de voix au dehors.

PENSÉE, lui saisissant la main. — Mais non, si tu le veux, viens ! Nous ne le verrons plus. Allons-nous-en ! SICHEL. — Partons. Et d'ailleurs je tremble de te

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