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526 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

comme ces paysans un modèle d'application, d'obstination au devoir. Il n'aborde pas son sujet avec une idée pré- conçue, un truc infaillible pour obtenir la beauté. Il connaît le « métier »; il possède une fois pour toutes des moyens suffisants. Il n'essaie pas d'amplifier le sens de son œuvre par un tour de main, un énervement de la brosse, une agitation volontaire. Son travail reflète sa sérénité intérieure. Il fait pour le mieux. Il ne bouscule rien ; il n'adopte aucun maniérisme qui pourrait troubler la pureté de son interrogation : il analyse, et c'est là le secret de sa grandeur; c'est là le secret de la grandeur des peintres français. Des poètes agités, des peintres aux visées grandioses nous ont trop parlé de l'Italie, comme certains philosophes nous ont trop parlé de l'Allemagne. Le « Colossal », le « Décoratif », nous ont trop longtemps séduits. Il nous faut à tout prix réaliser que la pureté de notre culture française consiste, non dans le goût de la quantité, mais dans un sens de la quaUté que nous sommes les seuls à posséder depuis les Grecs. Raphaël, certes, est un héros de la peinture, mais ce qui fait sa grandeur dans son pays est justement ce qui ferait son étrangeté en France. Il peint directement des Dieux. Les meilleurs peintres de chez nous peignent des hommes et ils obtiennent des Dieux. Nous ne voulons pas afi&rmer que ce soit là le secret défi- nitif de toute bonne peinture; mais actuellement le salut des peintres de tous pays dépend uniquement de celui des peintres français et le salut de ceux-ci dépend d'une appréhension des vertus strictement françaises. Il nous faut donc momentanément regarder d'un peu loin les génies étrangers que nos pères, en d'autres conjonctures, eurent profit à étudier, et décider, avec une volontaire

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