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274 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

mon ennemie. Plus d'accès. O lycée, on a verrouillé ta porte d'honneur, gigantesque, qui ne s'ouvre que sur des petits, qui s'ouvre d'un seul battant, comme un livre. On a par bonheur continué le Jardin public tout le long du mur de ronde, comme si l'on supposait que tes anciens élèves viennent le soir ici rôder ; et je tourne autour de toi, avec un Natoire et un Falconnet ; et ce n'est pas à beaucoup près, car tous deux étaient des gens simples et toi-même m'appris leurs noms, les compagnons ce soir qui me chargent le plus. Je tourne autour de toi avec tant de peintres et de lumière, tant de poètes et de chagrins que tu ne connais pas, avec un Manet et un Rimbaud, avec un Mallarmé et un Degas... Mais pourquoi, devant toi, chacun de ces noms me donne-t-il, comme un nom de faute, un remords?...

Rien qui défende un lycée contre l'escalade. Pas de chien. Pas de servantes... Voici la petite brèche par où je m'évadai une nuit pour aller dans la campagne. Je la franchis, je reviens de cette équipée. Voici la cour des petits, que je traverse d'un pas rapide, car elle est sonore et un pas paresseux mettrait tous les surveillants en éveil. Voici la cour des moyens et la porte avec sa fente par laquelle Dago nous passait, de la cour des grands, plus voisine du monde, page déchirée par page déchirée, les poètes défendus, et il fallait ainsi faire injure à son livre pour pouvoir honorer l'auteur; et voici, donnant sur les cloîtres, prises au fond des arcades bien plâtrées comme les fenêtres des maisons construites sous des aqueducs, les fenêtres de mon étude. Fenêtres si hautes qu'aucun élève ne peut voir la cour ; percées sur l'étude comme pour observer les enfants, percées des deux côtés pour les

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