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NOTE SUR M. DESCARTES IQQ

un mot de meurtre. Il répétait ce mot de meurtre et il ne voyait pas que c'était un mot de meurtre. Il n'avait pas pris littéralement cette rédargumentation de la lettre. Il n'avait pas pris au pied de la lettre cette rédargumen- tation de la lettre.

Cette parole que la lettre était un instrument de meurtre et peut-être le seul instrument de meurtre.

Et que dans la lettre était l'appareil même de la mort.

Et comme échappé d'un immense danger il considère ses ancêtres qui ne connaissaient pas la lettre. Un mot de sa grand'mère, oublié quarante ans, lui remonte sou- dain : Je ne sais pas mes lettres, ou : Je n'ai jamais su mes lettres, ou : On ne m'a jamais appris mes lettres, disait-elle un peu honteuse (ou animée de quel secret orgueil) ; car en même temps elle se considérait un peu (et même beaucoup) comme une curiosité, comme une rareté, comme un être d'un autre temps. (Elle ne croyait pas si bien dire. Elle était rudement d'un autre temps). Elle était fort intelligente. Elle voyait bien à quoi elle assistait. Elle voyait bien toute la montée de l'enseignement pri- maire. Elle voyait bien que tout le monde allait à l'école.

— Je n'ai jamais été à l'école, disait-elle. Ou de pré- férence :

— On ne m'a jamais envoyée à l'école. Quelquefois elle expHquait :

— A cet âge là je travaillais. Ou de préférence :

— A cet âge-là tout le monde travaillait.

Je voudrais bien savoir s'il y a un âge, à présent, où tout le monde travaille ; et à quel âge tout le monde travaille.

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