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lOgO LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

à créer chaque chose par sa description verbale ». De ces deux propositions, la première est fort claire : c'est la définition de l'art classique opposé à la poésie de calepin, à la notation confidentielle. Quant à la seconde, j'y crois bien discerner la pensée de l'auteur, mais les termes de « description ver- bale » ne me paraissent pas les plus propres à la rendre sensible. Un art dont le langage écrit ou parlé est l'instru- ment, dont le mot est la matière, ne peut créer qu'en transpo» sant dans le plan lyrique des objets réels. Mais de quelle façon ? Sera-ce par simple désignation, ou par allusion, ou par le moyen de la description ? Dans le premier cas le poète se contente de nommer un objet, escomptant la formation spontanée des images dans l'esprit du lecteur. Dans le second, qui est en somme le Symbolisme, on spécule sur la jouissance cérébrale engendrée par des associations d'idées et sur la surprise des correspondances ou des analogies plus ou moins imprévues. Enfin la poésie purement descriptive vise à satisfaire le goût de l'imitation, qui est à l'origine des arts ; son ressort principal est le plaisir de la difficulté vaincue. A chacun de ces états de la création poétique un vice litté- raire est plus spécialement attaché. Ce sont respectivement la platitude, l'affectation et la prolixité. L'art classique réalise l'équilibre des moyens dont aucun n'est à rejeter ou à préconiser à l'exclusion des autres. La nouveauté, en fait de poésie, n'est faite que de réactions successives et d'opportunes restaurations. La nouveauté de Prikaz réside justement dans cette émotion impersonnelle à laquelle le poète veut restituer sa valeur. Tout ce qui est subjectif y est réduit à un rôle d'accompagnement. Le flot miroitant des impressions y roule sous les arches sonores d'un chant soutenu, récit mélodique qui domine le bruissement des- criptif de l'orchestre. On a reconnu la forme du poème épique, considéré, à l'époque où la hiérarchie des genres était admise, comme le plus grand et le plus noble de tous. Avoir

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