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RIMBAUD 35

médecine et la philosophie, — les remèdes de bonne femme et les chansons populaires arrangées. " ^ Tout ici-bas est coutume et institution. L'institution est un compromis avec l'imparfait, une réparation à l'édifice croulant du monde au moyen d'habitudes accumulées. Elle pousse sur des ruines et ne se soutient que par sa complication infinie. Il ne faut pas y aller trop fort avec elle ; il faut prendre sa pente, épouser sa rampe glissante et polie, se laisser conduire à son antiquité. Voilà les ménagements dont l'obligation saisit Rimbaud d'impa- tience et de folie : " Les blancs débarquent. Le canon ! Il faut se soumettre au baptême, s'habiller, travailler. " * Tout ce qui nous donne aisance et douceur, tout ce qui nous facilite la vie, c'est là justement le poison qui l'attaque et le dévore : "Quant au bonheur établi, domestique ou non... Non, je ne peux pas. " ^ En tout ce qu'il touche, il trouve je ne sais quoi de bénin et de malade qui le fait hurler : " Nous mangeons la fièvre avec nos légumes aqueux. Et l'ivrognerie ! et le tabac ! et l'ignorance ! et les dévouements 1 " * " Ce peuple est inspiré par la fièvre et le cancer. Infirmes et vieillards sont tellement respec- tables qu'ils demandent à être bouillis. " ^ De là ce per- pétuel effort pour s'échapper de la civilisation, pour quitter l'Europe : " Me voici sur la plage armoricaine. Que les villes s'allument dans le soir. Ma journée est faite ; je quitte l'Europe. L'air marin brûlera mes

' Une Saison en enfer : Mawvais Sang^ p. 260.

^ Ibidem, p. 265.

' Ibidem, p. z6j-6%.

  • Une Saison en enfer : L'Impossible, p, 299.

^ Une Saison en enfer : Matcvais Sang, p. 264-65.

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