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— Je vous avertis, poursuivit Mme Irnois, qu’elle est prévenue en votre faveur, et cela je ne sais comment, car elle ne sort jamais, et je ne sache pas qu’elle vous ait jamais vu.

— C’est un effet de la sympathie, s’écria Cabarot en riant ; mais encore, ne pourrai-je la voir ? Nous causerons de tout cela fort à loisir ! Je brûle de lui être présenté.

— Catherine, dit Mme Irnois, va je te prie dire à Jeanne de l’apporter.

Ce mot : l’apporter, donna un frisson au comte Cabarot. Il pensa qu’on venait de lui parler de difformité. Il se figura les choses au pire. De quelque philosophie qu’il fût doué, il eut un moment d’hésitation. Il fut sur le point de se poser lui-même son mariage comme une question et d’admettre des causes de rupture ; heureusement, cette crise ne dura pas. Il se rappela sur-le-champ qu’une auguste volonté avait été compromise par lui dans cette affaire, et que reculer, c’était, en quelque façon, faire mépris des bienfaits du maître ; que d’ailleurs il épousait fort peu la fille et beaucoup la dot ; qu’avec une fortune comme celle dont il aurait la jouissance, il aurait la pleine liberté de loger sa femme aussi loin de lui qu’il voudrait, et même de la reléguer à la campagne, si le séjour dans un même hôtel venait à lui déplaire.

Le comte Cabarot avait à peu près terminé les réflexions que l’on vient de voir plus haut quand la porte s’ouvrit, et la tante Catherine reparut.

— Voici Emmelina, dit-elle, en reprenant sa chaise et son tricot.

En effet, derrière elle entra Jeanne, portant la jeune fille dans ses bras. Ce fut une scène singulière.