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quel serait l’heureux mortel vainqueur du dragon (le père Irnois) et possesseur des pommes d’or (la grosse fortune) ? C’était une question que l’on s’adressait volontiers dans quelques cercles des plus élevés de ce temps-là.

L’époque actuelle a la réputation mauvaise ; on lui reproche d’aimer l’argent avec excès ; mais, pour ne pas être injuste envers elle, il faut avouer que la passion du pécule a dévoré bien des hommes avant que notre génération apparût sur la scène du monde, et que, sous l’Empire, on pouvait trouver sans peine des personnages qui, tranchant par leurs convoitises sur les passions guerrières du temps, s’abandonnaient au goût des capitaux avec autant de verve que nos hommes de bourse les plus acharnés. Dans ce temps-là, certains grands messieurs, spéculant sur la gloire nationale, aimaient à mettre la main dans les caisses de l’étranger. Il y en eut aussi d’autres qui mirent leurs espérances de fortune dans la conclusion de riches mariages, ni plus ni moins que les illustres roués de la Régence, et, par une circonstance toute particulière à cet âge, ces gens-là surent détourner souvent à leur profit l’action de la puissance impériale, en faisant intervenir la volonté du maître dans des unions qui, sans ce secours quasi divin, n’auraient jamais pu se conclure. Sans doute je ne prétends pas dire que Napoléon se soit fait, de gaieté de cœur, le soutien d’ambitions aussi basses ; mais il voulait, en principe, que les grandes fortunes revinssent aux grands emplois, et, comme il arrive fréquemment sur cette terre,

Où les plus belles choses

Ont le pire destin,