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aO LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Il y a le beau visage derrière la figure chiffonnée. Cela n'apparaît que si Ton fait attention, que si l'on sait prendre patience quelques instants. On dirait une de ces gravures qui découvrent un second aspect pour peu que le regard veuille y mettre quelque insistance. Oui, à seconde vue, Rimbaud se révèle d'une beauté extraordinaire : ses traits, lorsqu'ils ne sont pas plissés par la haine, ont une har- monie, une justesse et une netteté incomparables. On trouve rarement une aussi pure, aussi pleine et inflexible adolescence.

Ne négligeons aucune des apparences revêtues par cet être étrange. Il y a le mendiant qui, de la mansarde que lui avait offerte Théodore de Banville, lançait par la fenêtre dans la cour ses haillons pleins de vermine. Mais il y a aussi, et en même tempSy le bon élève, le lycéen bien noté, honneur du collège de Charleville. C'est Rimbaud qui conquiert le prix de vers latins au concours académique de 1869. Et nous voyons, à cette occasion, le principal du collège le traiter avec cette faveur à la fois paternelle et légèrement intimidée que les maîtres témoignent aux élèves de premier ordre. ^ Au reste Rimbaud était en excellents termes avec ses professeurs : ils lui prêtaient des livres et lui, se plaisait en leur compagnie. Il ne semble pas avoir jamais appartenu à l'espèce des " chahu- teurs". Il avait même le léger brin de pédantisme, si caractéristique du bon élève : un certain penchant à la citation, une prédilection pour les mots savants. ^ Ses juge-

  • Voir Jean-Arthur Rimbaud, le poète, par Paterne Berrichon

(Libr. du Mercure de France) pp. 37-41.

• Il emploie sans cesse : carolopolitain pour : habitant de Charle- ville.

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