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RIMBAUD 19

rapport avec la plainte et la revendication. " Toujours même geinte, quoi ! " ^ s'écrie-t-il sans doute. Mais en même temps il ne songe qu'à s'aliéner tous ceux qui pourraient être tentés de lui porter secours. Il les chasse, il les bafoue, il se fait aussi repoussant que possible pour que leur pitié n'aille pas s'égarer vers lui. Il veut être seul : " Peut-être que tu aurais raison de beaucoup marcher et lire. Raison en tous cas de ne pas te confiner dans les bureaux et maisons de famille. Les abrutissements doivent s'exécuter loin de ces lieux-là. " ^ Il s'établit délibérément hors de toute consolation, de toute sympathie humaine. Car — et voici que nous touchons au secret de Rimbaud — le mal dont il souflFre, ce n'est pas une injustice dont il puisse souhaiter la réparation ; c'est un tourment personnel, réservé, qui lui a été donné en partage comme un mystérieux privilège.

��II

��Pour bien comprendre la nature de ce privilège, il nous faut considérer cette âme de plus près, il faut la débrouiller plus profondément que nous n'avons su faire jusqu'ici. Tâchons d'atteindre en elle le caractère qui nous donnera la clef de ses humeurs et de son génie.

Et d'abord remarquons un second visage de Rimbaud, que le premier ne doit pas nous cacher. Ce n'est pas seulement ce sale gamin. Il y a aussi l'enfant irréprochable.

^ Lettre à Delahaye, p. 579. ^ Ibidem, p. 579.

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