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LA MARCHE TURQUE ICI

Afîoun Kara Hissar.

'* Le château noir de rOpium ". Empire du morne e de la férocité. Alentour de la ville, de grands champs de céréales, mais pas trace des champs de pavots dont parle Joanne et qui sont, prétend-il, si beaux au mois de mai.

Notre train rapatrie grande quantité de soldats. Ceux que nous avons trouvés dans le train en montant à Eski Cheir viennent de Constantinople ; ils ont fait la guerre des Balkans, et sortent enfin à présent des hôpitaux ou des prisons. Ceux qui montent à Afioun Kara Hissar reviennent par Smyrne du Yemen, après avoir réduit une insurrection des Arabes. Terriblement réduits eux-mêmes. La plupart sont loqueteux, sordides ; quelques uns sem- blent moribonds. Nicolas nous appelle pour nous en montrer un qui n'a plus qu'une guêtre et, à l'autre jambe, qu'un soulier ; qui n'est plus vêtu que de hardes. Son pantalon de toile, déchiré, retombe sur la jambe sans guêtre. Sa maigreur est hideuse et sa faiblesse telle qu'on a dû le hisser dans le train. Sur le quai de la station d'Afioun, d'abord, il restait assis sur un sac ; un camarade était penché vers lui, et sans doute lui proposait quelque nourriture, à qui le moribond répondait en balançant la tête ; son regard me rappelait celui d'un chameau aban- donné le long de la piste entre M'reyer et Touggourt qui, un instant, souleva la tête pour regarder passer notre voiture, puis qui la laissa retomber ; à la fin il accepte un peu d'eau, ou je ne sais quoi, que l'autre soldat lui fait boire, et pour remercier il essaie un sourire, grimace affreuse qui découvre toutes ses dents.

— Madame a vu comme il est vêtu, dit Nicolas. Sont

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