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190 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

nople ; des cigognes. Mon oeil goûte inlassablement l'inépuisable attrait de l'espace.

12 mai.

A 5 h. du matin départ d'Eski Cheir où nous avons passé la journée de la veille. Le train s'engage dans la passe mystérieuse que l'on distinguait au sud-ouest de la ville. Vallée étroite entre des monts de terre rouge effritée ; monts point très hauts, et de hauteur partout égale, comme passés à la toise, qui s'achèvent en table ; sans végétation aucune. Noblesse étrange de cette vallée sous ce ciel admirablement pur.

Bientôt les collines, aux deux côtés de la rivière, s'abaissent encore ; le sommet des collines s'argente ; quelques pins font une moucheture à leurs flancs. On entre enfin dans une sorte de plaine semée de singulières efflorescences rocheuses. De loin en loin quelques villages, chacun d'eux doublé d'un cimetière planté de menhirs.

Puis de nouveau le pays change. Le sol perd sa rougeur. Une mince rivière que bordent de petites berges abruptes, hésite en maints détours entre les larges plis du terrain. De grands labours s'étendent, jusqu'au pied de ces étranges sursauts rocheux, qui, de loin en loin, crèvent la terre par surprise, sortes de citadelles grises, baroques, que verdit un peu le lichen et que tapisse aux endroits plans un gazon ras. La terre est cultivée, mais oii sont les cultivateurs ? Aussi loin qu'on peut voir, et depuis assez longtemps, plus un être, plus un village, plus même une tente isolée.

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