NOTES 163
Allemands qu'il aime. Quelques Français déjà se sont mis à les aimer à travers lui : c'est un hommage que nous tenons à lui rendre, le plus beau, le seul.
M. Guilbeaux en effet nous choque par plus d'un côté* Préoccupé d'abattre les frontières, il abuse de la grosse artillerie. Certes, nous sommes en France trop délicats. Les goûts et les dégoûts que nous entretenons témoignent souvent d'une suffi- sance qui nous paralyse. L'accueil que nous faisons aux poètes " barbares " est trop poli, d'une politesse qui tient à distance. Avons-nous cependant commis envers les Allemands un déni de justice aussi monstrueux que M. Guilbeaux le laisse enten- dre ? Ignorons-nous aucun de leurs grands noms ? Avons-nous tardé à accueillir aucune des manifestations essentielles de leur pensée ? Du naturalisme allemand il n'y avait que Hauptmann à retenir. Or il ne commença de percer qu'en 1889, de triompher qu'en 1892, et dès 1893 Antoine jouait ses drames. Il faut relire dans la Fme BUhne de 1893 les articles où des écrivains encore si discutés chez eux se réjouissaient de trouver en France une intelligente sympathie. Dès l'apparition du Modemer Musenalmanach auf das Jahr 1893, Henri Albert introduisait auprès des lecteurs du Mercure: Bierbaum, Dehmel, Hartleben, Holz, Liliencron, Schlaf, Scheerbart, c'est-à-dire avec les modernes de la première heure les repré- sentants d'un lyrisme qui allait prendre le pas sur la littérature sociale et la prose naturaliste. Nietzsche qui jusqu'en 1890 était demeuré inconnu de ses compatriotes au point de songer à ne publier plus qu'en français, allait nous apporter des aspirations allemandes une synthèse si éclatante et si totale qu'aujourd'hui encore n'ignorant rien de lui nous ignorerions à peine quelque chose de l'Allemagne.
Sur ce point on ne nous apporte pas de révélation. Reste le gros de la troupe. Nous le connaissons mal, encore que nombre de poètes aient fait l'objet d'études remarquables comme celle que M. Andler a consacrée à Liliencron. Mais l'ensemble
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