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128 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

" On sait que cette sainte si raisonnable et si modérée devint, par la suite, la patronne la plus populaire des Méridionaux. Ainsi le voulut l'indulgente ironie divine. " N'oublions pas que la plupart de ces contes sont contemporains de l'excursion de Jules Lemaître dans la politique, alors qu'avec de candides artifices, il avait rêvé de faire de la Patrie Française une sainte Marthe, qui, après avoir tué la Tarasque, fût devenue la patronne des Méridionaux et de nous. Espérons qu'il nous donnera un jour les Mémoires de sa vie sur ces temps et sur d'autres : en tout cas voilà dans ces premières Marges les mémoires de son imagination.

La seconde série contient bien, avec V Enfant Jésus et le Bon Maçon, un souvenir de la période des bonnets à poil et des bonnes élections. Mais, dans son ensemble, elle réalise avec indépendance et souplesse toutes les significations du titre : elle s'ouvre, en guise de préface, par la lecture académique 5«r les Vieux Livres, et, cette fois, M. Lemaître s'efforce de donner à ses contes un tour historique, objectif, de nous faire penser aux livres mêmes à l'occasion desquels il les écrit. En marge de Vilkhardoin met en présence, simplement, l'âme occidentale sérieuse, simple et forte, l'âme grecque passionnée de subtilités et mère des hérésies. Le Renégat ne vise qu'à évoquer la figure de Saint-Louis. Panurge marié et Dulcinée mènent le Don Quichotte et le Pantagruel à la conscience claire, à l'intelligence désabusée et tranquille qui les achève comme la fumée du soir sur le toit d'une maison humaine. Mère et file, La Fontaine chez les Voleurs, le Journal du duc de Bourgogne nous font pénétrer aussi délicatement dans le cœur de Madame de Sévigné, de La Fontaine, de Fénélon. Cette seconde série est du temps où M. Jules Lemaître, passé des conférences politiques aux conférences littéraires, étudiait, un peu pour eux-mêmes. Racine, Fénélon, Chateaubriand. Il cherche, dans les vieux livres, l'âme de ces vieux livres : il ne leur demande pas, ou leur demande moins, de nous révéler, la sienne.

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