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intacte l’image du vrai visage de sa mère, rayonnant d’esprit et de bonté. Ainsi montèrent-elles l’une à côté de l’autre, — scandalisant presque, par leur froideur, Françoise qui eût voulu qu’elles se jetassent en pleurant dans les bras l’une de l’autre, — ma grand’mère cachée dans sa mantille blanche, ma mère détournant les yeux.

… Maintenant ma grand’mère sentant qu’on ne la comprenait plus, renonçait à dire un seul mot et restait immobile. Quand elle m’apercevait elle avait une sorte de sursaut, comme ceux qui tout d’un coup manquent d’air ; elle voulait me parler, mais n’articulait que des sons inintelligibles. Alors domptée par son impuissance même, elle laissait retomber sa tête, elle s’allongeait à plat sur le lit, le visage grave, de marbre, les mains immobiles sur le drap, ou s’occupant d’une action toute matérielle comme de s’essuyer la main avec son mouchoir. Elle ne voulait pas penser. Puis elle commença à avoir une agitation constante. Elle voulut sans cesse se lever. Mais on l’empêchait de le faire de peur qu’elle ne se rendît compte de sa paralysie. Un jour qu’on l’avait laissée un instant seule, je la trouvai debout en chemise de nuit qui essayait d’ouvrir la fenêtre. Peut-être mue par l’un de ces pressentiments, que nous lisons parfois dans le mystère de notre vie organique si obscure et où pourtant il semble que se reflète obstinément l’avenir, elle m’avait dit à Balbec le jour qu’on avait sauvé malgré elle une veuve qui s’était jetée à l’eau, qu’elle ne connaissait pas cruauté pareille à celle d’arracher une désespérée à la mort qu’elle a voulue et de la rendre à son martyre. Nous n’eûmes que le temps de saisir ma grand’mère, elle soutint contre ma mère une lutte presque brutale, puis vaincue, rassise de force dans son