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PARSIFAL 759

chose de spasmodique ; ils sont faits de cris de colère, travaillés par l'excès et par la démesure. Il peut arriver qu'ils soient admirables, lorsque le sujet, comme dans Tristan^ est justement l'excès et la démesure. (Quoi de plus poignant que les hurlements informes de Tristan et d'Isolde au moment de leur rencontre du deuxième acte ?) Mais ils peuvent être aussi très froids, très vides, très pauvres. (Exemple : une grande partie de la scène du deuxième acte entre Kundry et Parsifal.) La vraie pauvreté de Wagner est dans les moments de drame. Même l'orchestre y prend souvent je ne sais quoi de sec et d'embarrassé. (Que l'on songe par constraste aux prodi- gieux soulignements du dialogue dans Boris et dans Pelléas !) Le musicien est comme arraché à son élément ; il respire mal ; il suffoque et fait des gestes convulsifs. L'heureux et fécond discours s'est interrompu ; il n'y a plus à entendre que la rage de ce géant brutal, en mal de stérilité.

Si Wagner n'est pas principalement un génie drama- tique, où donc est son génie ? En quoi Parsifal est-il un chef-d'œuvre ? — Parmi toutes les opinions inconsidérées que M. Blanche a recueillies, aucune ne me paraît plus scandaleuse que la proposition de couper le rôle entier de Gurnemanz. Il est de tous le plus fourni en récits ; c'est sans doute ce qui lui vaut d'être proscrit par une critique superficielle. Mais comment ne voit-on pas que Wagner est justement l'homme du récit ? Croit-on que ce soit par hasard que les expositions de ses drames sont toujours si compliquées, si longues et si belles ? par hasard que ses héros si souvent s'interrompent d'agir pour se rappeler le passé, pour " ramentevoir " leurs exploits ou leurs mai-

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