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NOTES 519

rique, non sans se demander parfois ce qu'elle narre au juste, ce qu'elle raille précisément, ce que dans le fond elle symbolise. On est tenté de s'en tenir à l'action et de se satisfaire d'un enchaînement ingénu et singulier d'aventures et cependant on ne peut s'empêcher de se demander à chaque moment, si elle est aussi complètement gratuite qu'elle veut paraître, si elle n'a pas trait aux mœurs et au caractère d'un peuple que nous ne connaissons pas, si elle ne met pas en scène, par surcroît, des idées qui nous sont tout à fait étrangères. Je crois qu'on y peut mettre tout ce qu'on veut, qu'elle est entièrement vacante, non point par pauvreté, mais au contraire par richesse. L'auteur nous y présente une joyeuse et savoureuse énigme et nous laisse le choix du " mot ". — Un jeune rêveur, bon à rien tant qu'il n'est pas sorti du rêve, est amené un jour et malgré lui, A frapper violemment son père ; il le laisse pour mort et s'enfuit, tout confus. Que trouve-t-il dans le village morne où il s'est réfugié ? L'attente du " merveilleux " et de 1' " aventure " que son histoire va combler ; il trouve l'admiration de tous. Comme on l'admire, comme on l'aime, comme on se le dispute ! Lui qui ne savait pas lever le petit doigt, — avant de lever bien inopinément la bêche meurtrière — le voici salué comme un héros de l'action ! Laissons de côté la morale, elle n'entre pas en jeu dans son affaire. Encouragé par la louange, il lui pousse des ailes ; ce sera mieux qu'un héros : un champion, le cham- pion des plus étonnantes prouesses. — Hélas ! son père reparaît, qu'il n'a pas tué du tout. Son récit n'est-il qu'une fable ? Tout le monde s'en rit, et voici le héros menteur tout dépossédé de sa gloire, même de celle qu'il vient de mériter aux jeux, en présence de tous. Notre héros se fâche. Eh! qu'à cela ne tienne: il frappe son père d'un nouveau coup.. Cette fois on n'en peut douter: on le voit faire.. Mais le " toile " redouble. C'est un conte vrai que veut le peuple, non une vérité. Il veut croire, il ne veut pas voir. Le héros qui n'est plus devient un assassin. — Quelle ressource lui reste-t-il ? Ma foi ! celle de rentrer chez son père, avec son père,

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