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222 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

d'occuper un peu sa pensée. Il pressa le pas aussitôt... C'était elle ! Il la rejoignit à l'extrémité de la courte rue de Villersexel, mais estimant qu'il serait peu Baraglioul de l'aborder, se contenta de lui sourire en s'inclinant un peu et soulevant discrètement son chapeau ; puis, passant rapidement, il trouva fort expédient de se jeter dans un bureau de tabac, tandis que la jeune fille, prenant de nouveau les devants, tournait dans la rue de l'Université.

Quand Lafcadio ressortit du bureau et entra dans la dite rue à son tour, il regarda de droite et de gauche : la jeune fille avait disparu. — Lafcadio, mon ami, vous donnez dans le plus banal ; si vous devez tomber amou- reux, ne comptez pas sur ma plume pour peindre le désarroi de votre cœur... Mais non : il eût trouvé mal- séant de commencer une poursuite; aussi bien ne voulait-il pas se présenter en retard chez Julius, et le détour qu'il venait de faire ne lui laissait plus le temps de muser. La rue de Verneuil heureusement était proche, la maison qu'occupait Julius, au premier coin de rue. Lafcadio jeta le nom du comte au concierge et s'élança dans l'escalier.

Cependant Geneviève de Baraglioul, — car c'était elle, la fille aînée du comte Julius, qui revenait de l'hôpital des Enfants Malades, où elle allait tous les matins, — bien plus troublée que Lafcadio par cette nouvelle rencontre, avait regagné en grande hâte la demeure paternelle ; entrée sous la porte cochère précisément à l'instant où Lafcadio tournait la rue, elle atteignait le second étage lorsque des bonds pressés, derrière elle, la firent retour- ner ; quelqu'un montait plus vite qu'elle ; elle s'effaçait pour laisser passer, mais reconnaissant tout à coup Lafcadio qui s'arrêtait interdit, en face d'elle :

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