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I040 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

pas le style jésuite, c'est même tout le contraire. Et voilà ce que mademoiselle Paulette nous a fait, d'un mot, saisir.

Maintenant que nous avons la clef, nous pourrions analyser de même toutes les pages de M. Bordeaux, arriver aux mêmes conclusions, et nous convaincre qu'il y a dans la 'Nouvelle Croisade des Enfants une étoffe où l'on taillerait, avec des ciseaux, un conte fort aimable. Mais l'étoffe telle qu'elle est, dans son entier, dans son superflu, si elle ne nous donne pas cela, nous donne pourtant quelque chose de plus curieux qu'on ne croirait. C'est le moment de s'expliquer sur le futurisme de M. Bordeaux, qui consiste, en gros, je le dis tout de suite, dans la création d'un type nouveau de roman : le roman-film. Je rappelle que le futurisme, tant littéraire que pictural, n'est guère sorti, jusqu'aujourd'liui,ide l'Italie, qui est la terre natio- nale du cinéma. Et le futurisme, en effet, figure bien le principe du cinéma, appliqué de façon inattendue, parfois curieuse, aux arts. Une toile futuriste invite l'œil à la cinématographier, comme une tpile impressionniste invite l'œil à la recomposer avec des taches ; mais l'œil, si j'ose dire, n'en fait qu'à sa tête : s'il est jusqu'ici (je parle du mien) consentant aux invites de l'impressionniste, il ne veut rien savoir devant celles du futu- riste, et il a beau tourner sa manivelle, le cinéma ne marche pas.

Quoiqu'il en soit, M. Bordeaux, qui s'est dépeint, dans sa préface, comme le père le plus complaisant, doit conduire fort souvent ses fillettes au cinéma. Ecrivant, dans la Nouvelle Croisade, un conte pour ses enfants et pour ceux des autres, soucieux de les captiver ainsi que les captive Rigadin, il a, sans doute, malgré lui, inséré, comme un futuriste, le plus possible de cinéma dans son roman. Et je vous assure, que vu sous cet angle, son livre devient très curieux. Vous savez que la plupart des romans populaires passent aujourd'hui au cinéma, de Roger la Honte à Quo Vadis, et il y a quelques semaines les journaux nous annonçaient que M. Paiil Bourget avait traité avec une maison italienne pour la mise en film de Cosmopolis.

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