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D’UNE PARISIENNE

Le long panier est prêt, couvercle rabaissé ; la boîte de tôle qui recevra tout à l’heure la tête est placée.

La pluie en larges gouttes fait lentement toc, toc, sur les bois sinistrement étendus.

M. Deibler s’avance en boitant, et, spectral, fait jouer le déclic à plusieurs reprises pour essayer le couteau.

Les visages des spectateurs se tortionnent en dépit de leur volonté, et nous nous apparaissons les uns aux autres, dans la lumière qui déchire la brume pleureuse, très pâles, les yeux agrandis, la bouche crispée par l’ultime attente.

— Les portes intérieures s’ouvrent, lance une voix.

Et les têtes s’avancent d’un même automatique mouvement. Le silence plane. C’est l’unique minute de grandeur.

Les grilles, avec un bruit lent, s’effacent. Les hommes se découvrent en dépit de la pluie qui tombe. L’angoisse atteint son maximum d’intensité. Le condamné apparaît telle une loque lamentable.