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D’UNE PARISIENNE

mort, j’ai demandé que ces paperasses soient déposées au secrétariat de l’Académie. »

Avec un peu de regret dans ses petits yeux pétillants, elle désignait de la main des piles de manuscrits entassés sur des rayons.

Et, tandis que l’eau chantait dans la bouilloire de cuivre à reflets bleus posée près des tisons mourants d’un maigre feu d’automne, Clémence Royer ajoutait, avec un sourire sceptique au coin de ses lèvres minces : « Bah ! je m’en remets à la postérité du soin de tirer mes œuvres de l’oubli si on les en juge dignes. »

Peu à peu, tout en causant, la charmante femme se laissait aller aux souvenirs de sa jeunesse et me contait ses débuts.

Attentive, je notais en ma mémoire ses paroles et ses moindres gestes.

Assise sur un fauteuil bas, devant une petite table, l’auteur de tant de livres graves travaillait, tirait l’aiguille ; faisant métier de couturière, elle s’escrimait des ciseaux pour transformer une vieille robe de velours.

Elle souriait, s’arrêtait parfois au milieu de