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D’UNE PARISIENNE

gnon déférant. Jusqu’à sa mort, en effet, Puvis de Chavannes n’oublia jamais chaque matin sa visite à Berthe Audran. Accoudé sur la table de la repasseuse, il lisait ses journaux et confiait ses projets, ses espérances, ses déceptions, ses chagrins parfois, à cette femme simple mais dont il appréciait l’intelligence et le jugement sûr.

Curieuse physionomie, du reste, et type rare d’ouvrière, cette Berthe Audran, qui a une allure de grande dame et une éducation littéraire très cultivée.

Tous nos grands romanciers, à commencer par les classiques, lui sont connus. Les œuvres de Lamartine, de Musset, de Chateaubriand lui sont familières ; elle souligne, sans pose, mais avec beaucoup de justesse, les beautés de certaines pages qui la frappèrent.

Elle aime les vers chantants ; quand elle parle de Victor Hugo ou de Musset, ses poètes d’élection, elle s’oublie à réciter quelques fragments de la Légende des Siècles ou de l’Ode à la Malibran.