sente a recueilli les premiers fruits, dont elle travaille elle-même à reculer les limites, dont elle transmettra le vaste domaine à la génération suivante, sans qu’il soit épuisé par cet incessant labeur. La tâche est grande et difficile, puisque tant de fables nous cachent le berceau des premiers peuples, puisque tant d’empires ont disparu sans laisser de traces dans une suite interminable de révolutions, puisqu’il est sans doute des mystères à jamais impénétrables aux regards de l’homme dans les traditions confuses de l’antique Orient : mais d’autre part, ne sommes-nous point attirés vers la connaissance du passé par une merveilleuse clarté que, dans un sentiment mêlé de crainte et d’espérance, nous entrevoyons à travers les ténèbres des âges ? Ne savons-nous pas que sur cette terre qui a été le berceau de l’humanité nous allons retrouver partout les titres primitifs de son histoire, et que nulle part l’action divine n’a laissé plus de traces de sa présence ?
L’Orient a commencé le monde : mais lui-même, il ne fut pas condamné à une longue et douloureuse enfance ; il entendit retentir les premiers enseignemens que la Providence dispensait à l’homme dans ces âges reculés où l’intelligence créée à l’image divine était encore en possession de toute sa force et de toute sa spontanéité. Les traditions primitives y vécurent longtemps au sein des familles patriarcales d’où sortirent les cités, les nations, les empires, et l’on ne peut nier qu’une partie de cette énergie créatrice qui appartenait à l’esprit humain dans les anciens jours ne se soit encore manifestée à des époques plus rapprochées de nous dans les conceptions grandioses des philosophes et des poëtes. Ainsi, dès l’origine du monde, l’Orient avait en partage la sagesse d’un vieillard et, s’il est permis de chercher dans ses livres un symbole de cette maturité pré-