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NOËLS ANCIENS

Notre-Dame de Québec, par monsieur Molt, un Allemand, ancien protestant converti[1]. Ces adaptations audacieuses firent sourire tout d’abord ; puis il advint qu’après un temps relativement court, de la chanson apprise à l’auberge ou ailleurs il ne resta plus dans les mémoires que la mélodie ancienne, les strophes religieuses du prêtre-musicien avant absolument fait oublier ses couplets lascifs ou vulgaires. « On les chante, écrit très justement M. Ernest Gagnon, on les chante aujourd’hui sans penser à leur origine ; de même qu’à Rome on peut entrer dans les églises du Panthéon et de Santa Maria sopra Minerva sans songer aux héros de l’Antiquité ou aux rêveries de la théogonie païenne. »

Voici un amusant exemple de la manière de procéder de l’abbé Daulé.

Au monastère des Ursulines de Québec on chante, depuis bientôt quatre-vingts ans, un noël[2] que Daulé composa spécialement pour les messes de minuit du couvent dont il fut le chapelain plus d’un quart de siècle. Il est écrit sur la musique d’une chanson à boire ; la mélodie en est délicieuse, et j’en sais peu qui aient un carac-

  1. Sa femme et deux de ses fils périrent, en 1846, à l’incendie du théâtre de Québec, où brûlèrent vives près de cinquante personnes.
  2. Il est demeuré inédit jusqu’en 1897, date de la publication des Cantiques populaires du Canada français, par M. Ernest Gagnon, car il ne se trouve pas dans le Recueil que Daulé publia, en 1819, sous le voile de l’anonymat.
    Le Père Daulé eut un collaborateur dans la personne du colonel Joseph-François Perrault, fils de l’ancien protonotaire Joseph François Perrault. — « Le Père Daulé avait entrepris de composer un recueil de cantiques pour les offices religieux. Or, il était loin d’avoir l’oreille musicale et encore plus loin de posséder le feu sacré du poète. Dans cette double indigence, il songea à utiliser le savoir-faire du colonel Perrault, bon musicien, qui connaissait et chantait toutes les chansons du Pont Neuf. Celui-ci se prêta, avec plus ou moins de sérieux, au désir du Père Daulé en lui fournissant des chansons de l’ancien temps que le bon prêtre travestissait en cantiques.