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NOËLS ANCIENS

IX.


Après Jean de Brébeuf, Martial de Brives, Surin, Joseph de La Colombière, Pellegrin apparaît sur l’affiche. Je voudrais l’y fixer en lettres d’or, rutilantes dans une belle lumière de soleil, car ce nom-là est bien celui du Père des Noëls anciens de la Nouvelle-France.

Simon-Joseph Pellegrin, littérateur français, naquit à Marseilles en 1663. Il entra fort jeune dans l’ordre des religieux servites. En 1703, il envoya au concours de l’Académie française une épitre et une ode où il célébrait le glorieux succès des armes de Sa Majesté ; on accorda le prix à la première de ces pièces qui avait quelque temps balancé les suffrages avec la seconde. Cette singularité ayant causé du bruit, Madame de Maintenon voulut connaître cet auteur, heureux rival de lui-même, et lui accorda, sur sa demande, un bref de translation dans l’ordre de Cluny ; puis il fut sécularisé. Fixé désormais à Paris et libre de s’abandonner à son goût pour les lettres, l’abbé Pellegrin, qui n’avait point de fortune, imagina, pour subsister, d’ouvrir chez lui une boutique de madrigaux, de compliments, et d’épigrammes pour toutes sortes d’occasions. Il les vendait plus ou moins cher, selon les gens, et aussi, suivant le nombre de vers et leur différente mesure. À cette ressource précaire il en ajouta une autre : celle de travailler pour les théâtres alors établis à Paris et, en particulier, pour celui de l’Opéra-Comique. Ce qui fit dire plaisamment au poète Rémi :


Le matin catholique et le soir idolâtre,
Il dînait de l’autel et soupait du théâtre.


L’archevêque de Paris l’ayant mis en demeure de choisir entre la messe et l’opéra, l’abbé Pellegrin opta pour ce dernier et fut interdit. Sans vouloir excuser, en cette circonstance grave, la conduite de Pellegrin, il