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NOELS ANCIENS

Ce truc de reliure et de réclame explique clairement la phrase énigmatique de maître Florentin Lambert — c’était le nom de l’éditeur — dont l’esprit madré, retors et âpre au gain s’accommodait mal de la modestie de l’auteur dont il imprimait les œuvres. Il suffit de rappeler que Surin mourut en 1665 pour expliquer l’anonymat de l’édition de 1664. Le fameux jésuite, dont la réputation littéraire et la personnalité, absolument typique, dépassaient de cent coudées le renom du capucin, n’avait nul besoin de se réclamer du Père Martial de Brives pour assurer à son livre un gros succès de vogue et d’argent. Cette idée, — vieillotte aujourd’hui, mais alors pleine de fraîcheur et d’originalité — de battre monnaie en exploitant la plus-value d’un nom propre, appartient uniquement au rusé Florentin Lambert, et Surin n’est point le complice des intrigues de son éditeur.

Dans tous les cas, l’édition anonyme de 1664 des Cantiques Spirituels de l’Amour Divin ne contient qu’un seul noël, et encore appartient-il à Martial de Brives[1]. Mais il vaut bien, en revanche, tout un recueil. Qu’on en juge.


SUR LA NATIVITÉ DE NOTRE-SEIGNEUR ET SUR LA SAINTE EUCHARISTIE.


Grand Dieu, qui naquîtes mortel,
Étant de nature immortelle,
Vous passez encore à l’autel
Sous l’espèce sacramentelle ;
Jésus, l’Amour du Paradis,
Qu’êtes-vous maintenant ?
Que fûtes-vous jadis ?

  1. Martial de Brives, poète français, naquit à la fin du 16ième siècle. Il étudia à Paris et suivit un cours de droit à Toulouse où son père était président au parlement. Il y connut le gardien des Capucins et renonça à sa carrière pour entrer dans cet ordre. Il se livra d’abord à la prédication qu’il abandonna pour cause de mauvaise santé. Puis il rentra dans son couvent où la poésie religieuse absorba tous ses loisirs.