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ET SES AMIS

Rappelons-nous enfin que Mademoiselle de Montpensier eut le triste courage de faire écrire, par Segrais, contre Madame de Frontenac, des pamphlets outrageants, diffamatoires au premier chef. Cette action-là est inexcusable et je la qualifie de pure infamie. « N’insulte pas la femme que tu as aimée, dit un proverbe arabe, et ne crache pas dans la fontaine où tu as bu !

Mais la duchesse de Montpensier ne savait pas l’arabe !

Anne de la Grange était un caractère impressionnable, impérieux, rebelle à toute contrainte ; Froutenac, de son côté, avait la volonté d’un Richelieu et le même besoin de domination. On comprend que les conflits domestiques ne pouvaient manquer d’éclater entre deux pareilles natures, entre deux tempéraments irascibles, également avides d’indépendance absolue. Aussi, le bonheur intime des jeunes époux fut-il court : quatre ans à peine, de 1648 à 1652. Mais la froideur relative qui s’en suivit ne dégénéra jamais en mutuelle indifférence, encore moins en réciproque aversion. En voulez-vous une preuve ?

Après la Fronde, Madame de Frontenac qui, pendant toute la guerre civile, était demeurée fidèle à Mademoiselle de Montpensier, la suivit dans son exil de Saint-Fargeau.[1]

Frontenac, de son côté, s’en était allé vivre dans sa propriété de l’île Savary, près de Blois. Or, nous lisons dans les Mémoires de Mademoiselle de Montpensier — année 1652 — : « Il y avait souvent compagnie à Saint-Fargeau. Nous menions une vie assez douce et exempte d’ennui ; je suis la personne qui m’ennuie le moins, m’occupant toujours et me divertissant même à rêver. Je ne m’ennuie que quand je suis avec des gens qui ne me plaisent pas, ou que je suis contrainte.

« Comme (quand) la Vie de Madame Fouquerolles fut imprimée, je trouvai que cette occupation m’avait

  1. Saint-Fargeau est situé sur le Loing, dans l’Yonne.